TELEVISION – Michel Drucker en chat dans les locaux de L’Express.
Gaston: On vous reproche souvent de couper la parole de vos invités, de ne pas suffisamment les laisser s’exprimer. Est-ce que ce ne sont pas vos fiches qui vous y contraignent en vous imposant trop rigidement le prochain thème à traiter? Pourquoi ne vous donneriez-vous pas plus de latitude dans la conduite de vos entretiens?
Michel Drucker: Ce reproche m’est souvent fait, j’en tiens de plus en plus compte. Quand mon interlocuteur est un « bon client », ce n’est pas toujours le cas. Quand mon invité met du temps à s’exprimer ou a du mal à trouver son style, j’essaie avec plus ou moins de bonheur de donner plus de rythme à l’entretien. On vit à une époque où tout va vite, où on veut dire le maximum de choses dans le minimum de temps.
chatell: Vous avez eu une brillante carriere, pensez-vous prendre votre retraite, vous en avez l’âge, laissez la place aux nouvelles générations, ce serait pour vous une belle sortie en leur donnant un « petit coup de pouce »…
Michel DRUCKER: Depuis quelques années, je mets en lumière beaucoup de jeunes talents, c’est ce que je préfère. J’aime de plus en plus transmettre mon expérience aux plus jeunes, humoristes, ou animateurs. Il n’y a pas de retraite dans nos métiers. Ce sont les téléspectateurs qui décident si nous devons continuer ou pas. Pour ça ils ont une arme imparable, la télécommande. Le jour où la majorité zappera mes émissions, je comprendrai alors qu’il faudra passer le relais à la nouvelle génération. Je pense que le moment n’est pas encore venu!
jacky.archibald : Salut Michel,
Envisages-tu un « spéciale » pour tes 50 ans de télé?
Ton copain Jacky de Mornas
Michel DRUCKER : Non, je ne le souhaite pas, la fiction tirée de mon livre, et le doc Itinéraire d’un enfant de la télé qui la suivra, me donnent parfois l’impression d’avoir un pied dans la tombe. Donc pour mes 50 ans de télé, je ferai plus de vélo, de natation, et je regarderai devant moi, pas derrière. Salut Jacky, rendez-vous cet hiver dans les Alpilles.
Lauraine : Bonjour,
On connaît votre visage par coeur, j’imagine que vous ne passez pas inaperçu dans la rue, mais j’aimerais savoir qui serait Michel Drucker si vous n’aviez pas été animateur. Quel métier auriez-vous choisi ? Quels seraient vos grands rêves? Merci.
Michel DRUCKER: J’ai déjà répondu à cette question, j’aurais aimé soigner les gens, me mettre à leur service. Mon père médecin de campagne disait à la fin de sa vie, en 83, que j’étais devenu une sorte de médecin des âmes, et que je consultais tous les dimanches après-midis. Comme lui, j’ai le goût des autres et je pense que les gens le sentent.
Erematkin10 : Êtes-vous conscient de représenter une figure patriotique voire paternaliste aux yeux des Français qui grandissent à vos côtés et ce depuis plusieurs générations?
Michel DRUCKER: Non, mais plus le temps passe et plus on me le fait remarquer, que j’appartiens à la mémoire collective par ma présence ininterrompue sur le écrans depuis près de 50 ans. J’essaie de ne pas y penser, de peur que ça me paralyse.
Homos quebecensis : Cher Michel Drucker,
Je ne me lasse pas d’admirer votre calme souverain dans toutes les situations où vous vous trouvez. Et la mesure, la justesse de toutes vos interventions. Quel est votre secret?
Michel DRUCKER: Je suis en réalité un faux calme. Un grand anxieux, angoissé, toux ceux qui travaillent avec moi et mes proches vous le diront. Mais au fil des années, j’ai appris à être sous contrôle et à donner une impression de sérénité, même si au fond de moi l’inquiétude est toujours là. Mais notre métier est de ne rien montrer et mettre à l’aise nos interlocuteurs, qui eux aussi sont inquiets.
Erematkin10 : Jusqu’où une icône télévisuelle tel que vous a-t-elle la possibilité d’enfreindre la consensualité toujours de rigueur dans vos émissions; peut-il exprimer ses opinions propres, quitte à choquer par ses convictions?
Michel DRUCKER : J’ai toujours fait en sorte que mes convictions et opinions politiques n’apparaissent pas, car l’isoloir sert à ça. Mais la convivialité permet des confidences q’on obtient rarement dans la tension ou la contradiction. En revanche, j’essaie de faire en sorte que toutes les opinions puissent s’exprimer, c’est mon métier de donner la parole à tout le monde.
Erematkin10 : Avez-vous déjà pensé à orienter votre métier sur le domaine de l’investigation, et de délaisser la consensualité propre à toutes vos émissions pour nous faire découvrir un nouveau visage de Michel Drucker?
Michel Drucker : Oui, mais plutôt sur des gens qui appartiennent à l’univers du spectacle, montrer leur face cachée. Voilà pourquoi il faut les mettre en confiance. Les faits-divers m’intéressent moins. C’est la fragilité des gens célèbres qui m’intéresse.
pepel : A quand une émission sur Bob Dylan avec ou sans lui?
Michel DRUCKER : Quand il passera, je serai ravi! Pourquoi pas avec Cabrel. Je ne l’ai pas vu depuis 35 ans, mais avec plaisir!
michel_langres : Bonjour M.Drucker,
Quel est votre secret pour arriver à ce que les invités se sentent toujours à l’aise sur votre plateau?
Michel DRUCKER : Les années d’expérience, les centaines d’heures de télé, la répétition hedbomadaire de l’effort.
eddy : Etes-vous entouré par une équipe qiu prépare vos questions pour vos invités ou préparez-vous les vous-même?
Michel DRUCKER : Je suis entouré par deux équipes, une télé et une radio. On me prépare un canevas quelles que soient mes émissions, toujours avec plusieurs questions incontournables. Je pioche dedans en fonction des circonstances, parfois je les suis, parfois j’en pose d’autres, tout dépend de la forme de mon interlocuteur et de ses réactions. Mais je suis plus à l’aise dans l’impro.
emilien 59 : Cher Monsieur, après plus de 30 ans de télévision quel est votre plus grand et beau souvenir? Et si vous n’étiez pas animateur télé, que seriez-vous devenu?
Michel DRUCKER : Je suis content que vous me créditiez de 30 ans de télé, j’aimerais bien mais c’est 15 ans de plus! J’en ai beaucoup… mais le meilleur est à venir. Impossible d’en choisir un par rapport à un autre… peut-être ma première finale de Coupe du monde à Mexico, entre l’Italie et le Brésil… Si je n’avais pas été animateur, j’aurais aimé devenir médecin comme mon père et le remplacer, mais un généraliste médecin de famille.
NicoCO : Michel, vous êtes régulièrement comparé à Jean-Pierre Foucault pour votre bienveillance et les « monuments » que vous représentez dans le coeur des Français. Est-ce que cette comparaison vous agace, vous stimule, vous fait plaisir ou vous laisse indifférent?
Michel DRUCKER: Non, c’est la première fois que j’entends ça. On a le même âge, la même bienveillance, et ça me fait plaisir d’etre comparé à lui, c’est un ami! C’est une personne présente dans le coeur des gens depuis longtemps. On a débuté en même temps, et on se demande parfois comment on a fait pour être encore là.
Louise81 : Bonjour Monsieur Drucker,
J’admire beaucoup votre talent et j’ai lu un article disant qu’une fiction sur votre grande carrière allait être diffusée sur France télévisions. Je suis curieuse de la voir. Etes-vous satisfait du film et quand sera-t-il diffusé?
Michel DRUCKER: Je l’ai vu, ça m’a beaucoup ému, je ne sais pas si j’aurai le courage de la revoir le 19 décembre. Je ne suis pas bon juge évidemment, mais se revoir à l’âge de 10,11 ans dans mes situations vécues… Voir l’acteur Simon Abkarian jouer mon père m’a beaucoup perturbé. D’autant plus que mon vrai père apparait à la fin. Revoir ça 48 ans après m’a beaucoup perturbé. C’est une adaptation très fidèle de mon livre. Peu de choses ont été rajoutées. Mais j’ai trouvé ça très bien, c’est un hommage à ma famille, et à une France, notamment la Normandie, celle de mon enfance.
Claire : Bonjour, avez-vous déjà pensé à revenir au commentaire sportif, même occasionnellement ? Le sport est un milieu qui a beaucoup changé depuis les années 70, quel regard portez-vous dessus? Merci!
Michel DRUCKER : De temps en temps, l’envie me reprend mais il y a toute une nouvelle génération de reporters qui font ça très bien. Seul regret: en 98 Marc Teissier m’avait demandé de revenir pour la Coupe du monde. J’avais demandé à arrêter toutes mes autres activités dès janvier pour me préparer. En réalité, deux mois avant auraient suffi, alors je me suis contenté de la regarder devant l’écran. L’envie revient de temps en temps. Mais tout a changé, le rapport avec les gens etc.
puma: Entre passionnés du cyclique, quel est actuellement le type de machine sur laquelle vous volez? Vous est-il arrivé d’avoir des « frayeurs météo »? Merci et bons vols!
Michel DRUCKER: J’ai ma licence de pilote d’hélico, avec 1500 h de vol sur Alouette II, Ecureuil, B1, B2, B3, B4. Je viens de passer à l’avion. Je passe mes examens de pilote privé à Avignon, j’ai une quarantaine d’heures de vol sur Cessna 152 et 182, j’ai passé mon théorique, avec 10h de solo. Je commence les navigations. Oui pour la frayeur, cet été heureusement le Cessna 182 est équipé pour voler en IFR que je commence à maîtriser… mais j’avais un bon pilote à côté de moi.