Vu d’en haut, à vélo, en hélico, derrière un micro ou sous des trombes d’eau… Souvenirs.

Je suis fragile des bronches et, quand j’étais enfant, j’ai attrapé froid à la montagne, sous la pluie. C’était mon premier contact. La montagne m’a longtemps traumatisé parce que mes premières bronchites venaient de là et dans mon métier il n’était pas question de tousser à l’antenne…

Ensuite, je l’ai découvert professionnellement; parce que j’ai été le premier commentateur de ski de fond aux Jeux olympiques de 1968 à Autrans. C’est la première fois qu’on retransmettait du ski de fond à la télé. A 5 heures du matin, on devait avoir cinq téléspectateurs… Qui aurait pu prédire à l’époque que le ski de fond deviendrait une spécialité française.

«Rayer les saumons»

Ensuite, un contact impressionnant. J’avais un rêve quand j’étais gamin: c’était de devenir pilote. Et un jour je m’y suis mis et je suis devenu pilote d’hélico… J’ai rencontré des pilotes de la sécurité civile, du PGHM (Peloton de gendarmerie de haute montagne). L’économie de la montagne ne serait pas la même sans les hélicos; les ravitaillements, la construction des télésièges, le déclenchement des avalanches… L’hélico est indispensable à la montagne. J’ai fait plusieurs stages et j’ai découvert le Mont blanc, quarante ans après l’avoir découvert sous la pluie. Là, c’était magique. Vu d’en haut, avec des déposes sur tous les sommets, dans tous les endroits mythiques. C’était un grand choc…

Si on veut vraiment être impressionné, il faut avoir approché une paroi, quand on ne se rend pas compte des distances, avec les vents qui vous rabattent… Si vous voulez savoir ce qu’est la peur: c’est quand les pilotes du GPHM vous racontent, au retour de certains sauvetages, qu’ils ont «rayé les saumons». Le «saumon», c’est cette pièce de métal, comme une talonnette, au bout des pales de l’hélico… Ils se sont tellement approchés de la paroi qu’ils l’ont touché! Dans ces situations, à 5 cm près, l’hélico explose… Donc là, je peux vous dire, qu’il faut avoir un gros cœur!

Faux plats et vraies pentes

Et puis, un jour, j’ai voulu savoir ce qu’était la montagne à vélo. Et là, j’ai compris ma douleur. Je l’avais connu sur le Tour de France, où j’avais suivi tous les grands grimpeurs qui me fascinaient. Lors de mon premier Tour de France, en 1989, gagné par Greg Lemond qui avait battu ce pauvre Laurent Fignon d’une demi-seconde, j’avais suivi le Tour dans la voiture du médecin, la seule décapotable, où l’on soigne en roulant les coureurs sur leur vélo, à trente à l’heure, avant qu’ils ne regagnent le peloton. Celui qui n’a jamais suivi un coureur en perdition sur le Tour de France ne peut pas imaginer la dureté de la montagne. Le Tourmalet, le Galibier, l’Alpes d’Huez, le Ventoux, tous les grands sommets… A la télévision, on a l’impression qu’ils montent des faux plats! Je peux vous assurer que ce n’est pas le cas. Mais un jour, je me suis dit: «je veux voir ce que ça fait» et je me suis mis au vélo, tard, vers 50 ans. Bêtement, entraîné par des copains, j’ai accepté pour une course caritative de monter le Ventoux, qui est ma montagne puisque je n’habite pas loin en Provence. Et là, j’ai compris […]

On n’imagine pas en montagne, la somme de souffrance qu’il faut accumuler pour avoir du plaisir. Qu’on soit un randonneur, un cycliste, un montagnard, un coureur. La montagne, c’est un endroit qui me fascine, comme l’océan. Mais avant que ce soit un plaisir, il faut vraiment connaître les codes, tous les codes. Il y a une ivresse, une drogue dure. Tous ceux qui font de la montagne, les randonneurs, ceux qui font du hors-pistes, des  sports de l’extrême… Tous ont un grain.

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31 juillet 202216:10

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