A 73 ans, le taulier du PAF se lance dans le stand-up. Entretien avec un monument de la télévision, à un mois et demi de la grande première en Bretagne.

Le défi fou du taulier du PAF. À partir de fin janvier, Michel Drucker se lance dans le stand-up, à 73 ans ! À un mois et demi de la première en Bretagne, le résident d’Eygalières, dans les Alpilles, peaufine les derniers réglages. Et c’est à « La Provence », que le seigneur cathodique des dimanches sur canapé rouge dévoile, en partie, le contenu de cette création très attendue. Un seul-en-scène pétri d’anecdotes inédites sur le show-biz. Mots choisis avant sa venue, mardi, chez Cultura, à Sorgues, pour une séance dédicace.

Dans votre livre « Une année pas comme les autres » (Robert Laffont), vous évoquez le producteur Claude Cindecki, qui vous a conseillé de jouer seul sur scène. Mais en réalité, c’est Jean-Claude Brialy qui fut le premier à vous inciter à franchir ce cap ?
Michel Drucker : Oui, il y a 15 ans. Jean-Claude (Brialy) était mon voisin dans les Alpilles. On se retrouvait autour de grandes tablées d’amis. J’ai toujours aimé raconter les coulisses de ma carrière au contact des artistes. Même si à l’antenne, je ne suis pas là pour ça ! Je suis là pour mettre les autres dans la lumière. Jean-Claude m’avait dit : « ce serait dommage qu’un jour, tu ne racontes pas ça au public. » À l’époque, je disais : « Tout viendra en son heure ».

Qu’est-ce qui, aujourd’hui, vous a décidé à dépasser votre appréhension ?
M.D. : L’an dernier, on m’a beaucoup appelé pour parler de mes 50 ans de télévision, on m’a dit que même aux États-Unis, aucun animateur n’avait une carrière aussi longue. Et il y a eu ce sondage qui m’a placé comme l’animateur télé le plus emblématique, devant Léon Zitrone, Jacques Martin et Guy Lux. Il faut dire que je suis le seul à être encore vivant ! (rires) J’ai réfléchi, je me suis dit que c’était peut-être le moment de vider le disque dur, la première et la dernière fois pour regarder dans le rétroviseur.

Votre seul-en-scène intrigue beaucoup. À quoi va-t-il ressembler ?
M.D. : Les gens vont se dire : « Mais qu’est ce qu’il fait sur scène Drucker ? » (sourire). J’y pense depuis près de deux ans maintenant. J’y pense beaucoup. Je ne vais pas faire un spectacle comique, un spectacle de vannes. J’en serais incapable. L’idée, c’est vraiment de raconter les coulisses de ce métier à travers des personnalités qu’adorent les gens. J’ai tout écrit moi-même l’été dernier, chez moi, à Eygalières. Je n’ai pas voulu faire appel à un auteur car contrairement à Julien Courbet, Cauet ou Arthur qui sont montés sur scène, je ne recherche pas le rire. Je vais d’ailleurs débuter mon stand-up en expliquant au public que je ne suis ni chanteur, ni comédien, ni imitateur.

Vos amis artistes seront donc le fil conducteur du spectacle ?
M.D. : Voilà. Je vais raconter mon Léon Zitrone, dont j’ai été le stagiaire, mon Johny Hallyday, j’ai débuté au même moment que lui, mes Delon et Belmondo. Et mes présidents de la République. Vous savez, Sarkozy et Hollande avaient 10 ans quand j’ai commencé, Manuel Valls deux ans…

Est-ce que vous allez égratigner certains au passage ou cela restera-t-il un show universel pour 7-77 ans… et plus ?
M.D. : Je m’amuse d’eux, parfois avec ironie, et je me moque de moi. Par exemple, je vais raconter les coulisses de la rencontre entre Serge Gainsbourg et Whitney Houston (le soir où le chanteur avait déclaré devant l’Américaine : « I want to fuck her », ce que Drucker le casque bleu avait traduit par : « Il dit qu’il veut vous offrir des fleurs » ndlr ). Pendant le stand-up, une centaine de photos en noir défilera derrière moi.

Et vos parents ? De quelle manière seront-ils présents ?
M.D. : Ma mère sera effectivement très présente, elle ne me passait rien… Quant à mon père, je vais enfin réaliser son rêve puisque je vais me transformer en médecin. Il faut dire que je suis médecin de garde le dimanche après-midi…

Nous sommes à un mois et demi de la première représentation du spectacle, en Bretagne. Dans quel état d’esprit êtes-vous ? C’est l’impatience qui domine ou l’inquiétude ?
M.D. : Les deux. En ce moment, je répète une fois par semaine car c’est difficile avec mes activités. Autour de Noël, je vais passer 10-12 jours chez moi à Eygalières et je vais là aussi affiner.

Mais qu’est-ce qui fait le plus peur dans ce défi inédit pour vous ?
M.D. : Le plus dur, c’est de résumer 50 ans de carrière en 1h30. C’est mon angoisse. Ces derniers mois, j’ai enlevé un quart d’heure mais je dépasse encore l’heure et demie. Et puis j’ai deux peurs. La première, c’est que les salles soient vides. La seconde, c’est que le public ne soit pas content. Je suis un grand inquiet, ça ne se voit pas forcément dans mon métier mais j’ai des hauts et des bas. Je doute beaucoup.

Comment procédez-vous pour mémoriser le spectacle ?
M.D. : Je n’apprends aucun texte par coeur. Je ne sais pas le faire, de même que je ne sais pas non plus faire de la télévision avec un prompteur. J’aurai juste un pense-bête avec les noms de ceux que j’évoquerai. À partir de là, je saurai ce que j’aurai à dire. Chaque représentation ne sera jamais la même.

Avant de monter sur scène, avez-vous demandé des conseils aux artistes qui vous entourent ?
M.D. : Laurent Ruquier a eu la gentillesse d’écrire le programme du spectacle. Mais le seul artiste devant lequel j’ai joué une partie du spectacle, c’est Fabrice Luchini. Je savais qu’il me dirait la vérité, qu’il serait un juge impitoyable, et je voulais qu’il me dise si je devais continuer. Avant que je ne lui fasse une répétition rien que pour lui, au Théâtre des Mathurins, à Paris, il m’a dit : « C’est vrai, alors que tu vas monter seul sur scène ? Mais c’est énorme ! » Il y a six mois de cela, j’ai donc joué une demi-heure devant lui, sans décor, sans lumière. À la fin, Fabrice s’est levé et m’a dit : « J’avais envie que tu continues. Tu es parti pour cinq ans sur scène ! »

PROCHAINE ÉMISSION

Vivement Dimanche Prochain BEST OF HUMORISTES

31 juillet 202216:10

Les invité.es