Par Renée Mourgues

Les autobiographies de célébrités cathodiques sont rarement d’un intérêt fracassant mais l’exercice auquel se livre Michel Drucker rompt avec le genre. On songe plutôt à une introspection sans concession doublée d’une analyse clairvoyante de la « durée » qui obéit à des ressorts bien plus subtils que la soif d’exposition et le goût du vedettariat.
« Progresser, réussir, évoluer, se maintenir: quatre obsessions sur l’échiquier de la reconnaissance » et l’aveu d’un besoin irrépressible de demeurer sous les projecteurs. Un demi-siècle de petit écran ne lasse pas ce « vrai gentil », « le gendre idéal », l’hôte familier des téléspectateurs qui, doucement, vieillit avec eux en s’invitant dans leur foyer.

Lui qui a côtoyé _ et continue de fréquenter _ tant d’idoles pérennes ou éphémères les raconte sans cynisme, souvent avec tendresse. Certaines lui renvoient l’image terrifiante de la désaffection du public. D’autres ont su rebondir sans amertume. La majorité vit douloureusement le passage de la gloire à l’anonymat.

Si les éléments biographiques éclairent ici et là des traits de caractère de l’auteur, des postures personnelles ou professionnelles, ils ne prennent jamais le pas sur l’essentiel: « la fragilité des statues et des statuts », surtout dans les arcanes de la télévision soumise à des critères davantage liés à la quantité (l’audimat) qu’à la qualité des émissions.
A quelques exceptions près dont « Vivement dimanche », un rendez-vous de bonne tenue, à l’exemple de son animateur iconoclaste.

Ce milieu pernicieux dont Michel Drucker avoue avoir fait son « oxygène » ne flétrit pas la quintessence des souvenirs. De toutes les évocations d’artistes, celle d’Eric Charden se lit la gorge nouée tant les mots pour l’écrire ont su puiser dans le registre du cœur.

« De la lumière à l’oubli » de Michel Drucker. 376p. 21,50€